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La vallée de Ferney: retour dans un monde perdu

Tout à fait légitimement, notre petite île peut s’enorgueillir d’un niveau de développement technique et économique enviable. Pour autant, et sans remettre en cause les bienfaits de la modernité, des voix de plus en plus nombreuses réclament une meilleure protection de notre patrimoine naturel. A la Vallée de Ferney, le groupe Ciel et la Mauritius Wildlife Foundation s’attèlent patiemment à un projet exceptionnel: restaurer une parcelle de forêt primaire, retrouver la nature d’avant l’homme!

La visite de cette vallée exceptionnelle débute par un rapide trajet en 4×4 qui amène le visiteur sur les premières pentes boisées. Le jeune guide, Bhavish, fait preuve d’un bel enthousiasme à partager toutes ses connaissances. A chaque pas, il répond volontiers aux questions d’un charmant couple anglais et n’hésite pas à identifier presque chaque plante rencontrée. En quelques mots, il explique clairement la démarche mise en oeuvre pour preserver la vallée. “Une zone de préservation a été délimitée. L’objectif, à long terme, est de parvenir à recréer la forêt originelle, celle qui était là avant les hommes… Ou, du moins, au moment où arrivèrent les premiers hommes.” Nous parvenons d’ailleurs à la clôture qui cerne cette précieuse parcelle. Un petit pont, difficilement franchissable par les gros mammifères (cerfs, cochons marrons) nous permet d’y pénétrer. Nous voilà dans la zone qui concentre tous les efforts. Là, depuis déjà plusieurs années, le groupe Ciel, assisté par la Mauritian Wildlife Foundation et des scientifiques indépendants, dresse un état des lieux.

La vallée est un refuge pour les faucons de la région.

Le ravenale, une menace mortelle pour la forêt

Il s’agit de reconnaître les premiers habitants, végétaux ou animaux, de l’île, et de les isoler des espèces envahissantes. Les ravenales, ou arbres du voyageur, par exemple, constituent une menace mortelle pour la forêt primaire. Mais si cet envahisseur malgache est facilement identifiable, d’autres espèces sont moins évidentes à déceler ou à combattre… “Nous avons trouvé à Ferney, renchérit Bhavish, un nombre impressionnant d’espèces endémiques rares ou en voie d’extinction… et nous n’avons pas encore répertorié la totalité des végétaux présents ici.

La vallée de Ferney détient, par exemple, les seules populations connues d’‘Eugenia bojeri’ (Bois clou), de ‘Pandanus macrostigma’ (Vacoas), et s’avère être une zone de pousse clé pour l’‘Olax psittacorum’ (Bois perroquet), le ‘Pandanus iceryi’ (Vacoas), le ‘Poupartia pubescens’ (Bois poupart) et le ‘Polyscias dicroostachya’ (Bois d’éponge), qui sont tous considérés comme des espèces en voie d’extinction imminente par l’UICN (Union Internationale pour la Conservation de la Nature et de ses Ressources). Une pépinière sert de nurserie à tous ces arbres rares, dont les pousses sont ensuite replantées dans la Vallée.

A la sortie de la zone de conservation, un point de vue, exceptionnel, permet de dominer toute la région et le superbe lagon qui la borde.

La Mauritius Wildlife Foundation met en oeuvre un important programme de protection et de réintroduction des oiseaux les plus menacés.

Pépito et Pépita, un couple de faucons nourris à la main

Grâce aux efforts de la Mauritius Wildlife Foundation, la vallée est aussi un site important pour la préservation et la réintroduction de certains oiseaux endémiques, comme le pigeon des mares ou la grosse câteau verte, le dernier perroquet endémique de Maurice. De plus, quelques couples de faucons crécerelles (kestrel, en créole) ont élu domicile au flanc des collines. A midi pile, Bhavish a d’ailleurs rendez-vous avec Pépito et Pépita, un couple de faucons qu’il nourit à la main…

Sans être une randonnée sportive, la balade guidée dans la vallée de Ferney est une promenade un peu exigeante physiquement. Alors, pour les visiteurs qui n’auraient pas la condition physique nécessaire, Ciel propose un parcours en 4×4. Il n’est alors évidemment pas question d’entrer dans la zone sensible dédiée à la reconstruction de la forêt primaire, mais cela fournit toutefois l’occasion de découvrir une vallée encore preservée et de profiter de quelques très beaux points de vue.

Une autoroute au milieu de la forêt

Tout commence par l’annonce d’une veritable catastrophe écologique! En 2003, les autorités publient le tracé d’un futur tronçon autoroutier, dans le Sud de l’île. Très vite des militants écologistes, regroupés notamment au sein de l’association EcoSud, se mobilisent contre le projet gouvernemental. Leur principal argument: la future autoroute doit traverser l’un des tous derniers îlots de forêt primaire, dans la Vallée de Ferney… La presse se saisit de l’affaire, des études, menées par des scientifiques indépendants démontrent que, effectivement, une partie de cette vallée constitue un écosystème d’une rare richesse, comportant de nombreuses espèces endémiques, végétales ou animales…

Après de longues semaines de mobilisation, le pouvoir politique fait marche arrière et annule les travaux. Pour autant, il convenait de donner à la Vallée un statut qui puisse assurer sa protection. En association avec l’ONG WildLife Foundation, déjà en charge de programmes réussis de préservation d’espèces menacées, le groupe Ciel propose un projet d’exploitation écotouristique de la Vallée de Ferney. Ce programme sera finalement agréé par les autorités et démarrera en 2008.

Un couple de britanniques trés concernés

Sian et John vivent au sud de Londres et se sont mariés il y a juste quelques mois. “C’est d’ailleurs un peu notre voyage de noce”, confie Sian, avec un sourire désarmant. Logés au Prince Maurice, ces deux sympathiques sujets de Sa Trés Grâcieuse Majesté profitent de leur séjour sur notre île pour tenter d’en découvrir tous les aspects. Et nos richesses naturelles font partie de leurs centres d’intérêt. Déjà engagés, chez eux, dans la protection de l’environnement, ils y pratiquent régulièrement le “bird watching”. Il s’agit de l’observation, l’identification et le recensement des oiseaux. Ils se sont donc révélés être des visiteurs particulièrement attentifs, lors de l’excursion dans la “zone de préservation”, admirant les pigeons roses, faucons et autres volatiles rares. “C’est une visite exceptionnelle, commente John. Nous évitons les attractions attirant trop de visiteurs. Là, la visite s’est faite en petit comité, avec la possibilité d’avoir toutes les informations que nous souhaitions, c’était passionnant!” “Surtout, renchérit Sian, que nous avons pu voir des oiseaux magnifiques, des plantes rares et des insectes étonnants.

Falaise Rouge: une excellente table devant un lagon magnifique

A quelques centaines de mètres de l’entrée de La Vallée de Ferney, le restaurant Falaise Rouge constitue une halte idéale. Posé au bord de l’immense lagon de Mahébourg, face à l’Ile de la Passe, il propose une cuisine traditionnelle et savoureuse, dans un cadre… spectaculaire.

En salle, à l’abri des embruns, les jours de grand vent, en terrasse ou carrément dans le jardin, sous un ciel sans nuage, on peut y déjeuner en toute saison, par tous les temps.  A la carte, des plats qui font partie du patrimoine culturel mauricien, comme le gratin de palmiste,  les camarons, le vindaye de cerf ou les prises des pêcheurs locaux… Falaise Rouge n’est pas, à proprement parler, un restaurant “gastronomique”. Son “chef” n’est pas une star et le service, efficace et chaleureux, n’a rien de compassé. Pour autant, il s’agit d’une excellente adresse pour ceux qui voudraient découvrir une cuisine mauricienne aussi simple que goûteuse. Quant au panorama, il est juste exceptionnel, puisqu’il couvre la plus grande partie du lagon…

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