La restauration écologique des pentes de Petite Montagne avance à grands pas sur son flanc nord, mais le projet de valorisation du Fort Adélaïde, qui l’a déclenché, semble avoir été oublié… Seule fortification anglaise en bon état, son utilité a été questionnée depuis les débuts. Dominique Bellier
Un ballet incessant de taxis et bus touristiques anime chaque jour les hauteurs de La Citadelle. Avant que le fort ne soit construit, les Port-Louisiens s’y aéraient déjà en soirée. À environ 100 mètres d’altitude, la vue est imprenable sur la capitale, les montagnes et le port. Ouvert au public, l’édifice a accueilli des spectacles et expositions, mais ses espaces intérieurs demeurent relativement dénudés.
Sa construction a d’abord été envisagée par les Français, l’ingénieur militaire Desforges-Boucher ayant lancé des travaux en 1743. Ils ne reprirent qu’en 1833 à l’initiative des colons anglais, pour s’achever en 1840, illustrant les bouleversements liés à la transition de l’esclavage vers l’immigration sous contrat. Baptisé Adélaïde en l’honneur de l’épouse du roi Guillaume IV, le fort a bénéficié d’une main d’œuvre hétérogène, qui allait du tailleur de pierre créole à l’ouvrier qualifié de Bombay, en passant par des prisonniers militaires et condamnés indiens…
L’historienne Marina Carter rappelle qu’il devait combler l’absence de défense militaire consistante à Maurice, en protégeant la capitale contre les menaces extérieures certes, mais aussi intérieures, venant d’une population française prompte à contester l’occupant anglais. Entretemps, la situation a tellement changé qu’il n’a finalement servi que lors de rares mobilisations temporaires.
Une restauration dans les années 1990 a auguré une renaissance de La Citadelle comme espace de loisir. Son architecture militaire complète permettrait d’accueillir un musée passionnant sur l’histoire tumultueuse de sa construction dans une période-clé de l’histoire, valorisant sa main d’œuvre multi-ethnique, ses soldats et ses capacités défensives.
