La paix pour les cachalots !

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Si le confinement a été une bénédiction pour la tranquillité de nos grands mammifères marins, ses lendemains sont moins réjouissants. Le business touristico-nautique a si bien repris que les observateurs du monde marin tirent depuis plusieurs années la sonnette d’alarme sur l’état de santé des cachalots qui résident dans nos eaux. Le naturaliste marin Hugues Vitry nous aide à y voir plus clair. Dominique Bellier

Nager avec les cachalots est devenu une activité à la mode non seulement pour des influenceurs ou d’anciens champions en mal de gloriole, mais aussi pour des touristes en quête de frissons, à qui des opérateurs sans scrupules omettent de préciser que cette nage est interdite depuis 2012. Évidemment, nager avec les cachalots rapporte beaucoup plus sans coûts supplémentaires que leur observation respectueuse à bonne distance. Des films et émissions radiophoniques ou télévisuelles sur des chaînes françaises ont amplifié cette vogue, de même que la fermeture cette année de l’accès à l’île aux Bénitiers, qui a poussé des plaisanciers à s’y improviser.

Hugues Vitry, président de la Marine Megafauna Conservation Organisation (MMCO), observe les cachalots depuis dix-huit ans… tant et si bien que son organisation en a identifié 200 individus, parmi lesquels 25 à 28 résident à l’ouest des côtes mauriciennes. S’il en recense actuellement 25, il ne faudrait pas que ce chiffre baisse davantage… Notre interlocuteur estime qu’il y a plus de mortalité chez les résidents des zones côtières, que chez les migrateurs, qui évoluent à l’écart.

Plusieurs cadavres d’adultes migrateurs ont atteint nos côtes Est et Sud ces dernières années, certains à la colonne vertébrale brisée ne laissant aucun doute sur la cause accidentelle du décès par collision avec un navire… Le corps d’un grand migrateur s’est échoué en 2024, mais les cadavres des résidents partent au large, poussés par les vents dominants.

Hugues Vitry estime que la mortalité des bébés cachalots a triplé entre 2021 et 2025, un petit à la tête cisaillée par une hélice de bateau ayant échappé de peu à la mort. Perturbées par le harcèlement humain, les mères se mettent continuellement en mouvement. Elles fatiguent, chassent de moins en moins et s’amaigrissent considérablement. L’agitation les empêchent d’allaiter. Notre interlocuteur constate de plus en plus de blessures sur les adultes. En 2022 et 2023, l’équipe de la MMCO a vécu, impuissante, la terrible agonie de deux femelles d’une maigreur affligeante, tandis qu’opérateurs et touristes décérébrés profitaient du spectacle ! Des humains sont d’ailleurs régulièrement blessés.

Le Dolphin & Whale Watching Act de 2012 règlemente ces activités mais les sanctions prévues contre la nage illégale sont peu appliquées. Les ONG et les amoureux du monde de la faune marine attendent incessamment une implication plus forte du judiciaire, le renforcement de cette loi avec des sanctions plus sévères, qui toucheraient équipage, propriétaire de bateau et clients mis à l’eau. Des formations et campagnes de sensibilisation sont prévues de même que des moyens supplémentaires à la National Coast Guard. À suivre…

Photo : ©Hugues Vitry (MMCO)

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