Du nouveau au musée de l’esclavage

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Reportée en raison des funérailles du pape François, la visite projetée du président Macron a quand-même profité au Musée Intercontinental de l’Esclavage (ISM) de Maurice. Ce rendez-vous différé a en effet permis d’accélérer certains aménagements : l’arrivée de la maquette du Saturne, la mise en place d’une cale-type grandeur nature et, bientôt, l’ouverture au public de la salle aux trois bustes, réalisés par le savant Eugène Huet de Froberville. Dominique Bellier

Malgré l’annulation de la visite du président français, le ministre délégué à la francophonie, Thani Mohammed Soilihi est venu comme prévu en délégation, avec des représentants de l’île sœur, pour inaugurer l’exposition au public de trois bustes en plâtre réalisés en 1846, par l’ethnographe Eugène Huet de Froberville, qui les a moulés contre rémunération, sur d’anciens esclaves de la plantation de La Baraque. Cette délégation française comptait aussi des représentants de l’île sœur, notamment la présidente de région Huguette Bello. Cette visite a donné lieu à la signature d’un protocole d’accord de coopération entre le musée de Villèle, musée historique de l’habitation et de l’esclavage à La Réunion, et l’ISM.

La grande absente était la chercheuse française indépendante Klara Boyer-Rossol, dont le déplacement a été annulé concomitamment à celui du président. Elle a en effet été la cheville ouvrière du rapprochement entre Maurice et la France au sujet des archives et artefacts d’Eugène Huet de Froberville. Cette spécialiste des populations Makua de l’océan Indien et d’Afrique australe a patiemment convaincu les ayants droit de Froberville de rendre publiques et préserver ces archives extrêmement précieuses, dont elle connaît la richesse, en les confiant aux Archives nationales d’Outre-mer (ANOM) à Aix-en-Provence et en rapprochant le musée mauricien du Château de Blois, dont les réserves contiennent une cinquantaine d’autres bustes originaux…

Les trois bustes visibles très bientôt à des horaires spécifiques sont un avant-goût de ce qui sera donné à observer en 2026 ; un accord de dépôt/prêt à 5 ans renouvelables étant négocié entre les deux pays, pour l’ensemble de ces bustes. La salle qui accueillera plus de cinquante de ces visages aux yeux baissés, plus émouvants les uns que les autres, a été identifiée. Elle sera restaurée, isolée et dotée d’équipements de contrôle des températures et de l’humidité, pour que ces fragiles témoins du passé ne s’altèrent pas. Ces artefacts voués à l’étude des populations par un érudit du 19e siècle deviennent ainsi au 21e siècle des objets mémoriels pour les peuples de l’océan Indien. Ils incarneront un pan fondamental du commerce quadrangulaire qui a relié les anciens mondes aux temps maudits de l’esclavage…

Un des directeurs de l’ISM, le père Alain Romaine, s’est penché quant à lui sur un aspect de cette première forme de mondialisation, en défrichant l’histoire du navire Le Saturne. Nous lui devons l’aménagement des salles consacrées au commerce des esclavés, qui accueillent désormais une maquette de ce trois mâts, réalisée au 1/15e, et la reconstitution des cales, où l’on « stockait » les captifs pendant de longues et cauchemardesques traversées. Nous y reviendrons

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