La Chambre d’Agriculture de Maurice s’est lancée en 2015 dans le projet « Smart Agriculture » en vue de réduire l’utilisation des produits chimiques dans les productions agricoles. Le projet qui en est à sa deuxième phase, est aujourd’hui dirigé par deux jeunes françaises dynamiques envoyées par France Volontaires Région Réunion.
90% des agriculteurs utilisent des pesticides chimiques en préventif. Tel était le constat fait par la Chambre d’Agriculture de Maurice, à travers son étude sur l’utilisation des produits pesticides il y a 2 ans. C’est de cette investigation qu’est née l’ambition d’implémenter à Maurice, la “Smart Agriculture”, appelée aussi l’agriculture raisonnée, soit un mode de production visant à optimiser le résultat économique pour les planteurs tout en maîtrisant la qualité et la quantité des intrants utilisés, tels que pesticides, fertilisants ou eau.
Deux jeunes femmes à la barre
Chapeautée par l’ingénieure agronome Maud Scorbiac, Project Manager de “Smart Agriculture” et Blandine Rosies détentrice d’un Master en Agro-Ecologie, la deuxième phase du projet a pour objectif d’encourager les producteurs à se diriger vers une transition agro-écologique. Concrètement, deux réseaux composent cette initiative. L’un constitué de petits planteurs basés à la Laura et un second composé de membres de la Chambre d’agriculture: une vingtaine de producteurs est concernée en tout. Le but étant de changer les pratiques et de créer des innovations adaptées à différents contextes et enjeux de production.
« Il est encourageant de noter que cet état des lieux ait pu faire ressortir que 89% des planteurs interrogés sont très positifs quant à l’introduction de nouvelles pratiques agriculturales alternatives dans le pays. Mais les planteurs reconnaissent aussi leur manque de formation sur les nouvelles pratiques. L’autre contrainte de taille qui s’impose aussi à eux c’est le consommateur lui-même très à cheval sur l’aspect des légumes. En effet, ce dernier a des exigences assez élevées: il ne va pas forcément regarder s’il y a moins de pesticides, mais si c’est moins cher, beau et lisse », détaille Maud Scorbiac.
Sur le terrain le plan d’action comporte plusieurs aspects: la certification, la commercialisation, la législation et l’accompagnement des producteurs a été mis en place. Cette deuxième phase du projet s’appuie aussi sur ce qui se fait en France pour mettre en place le système DEPHY, dont le but est de gérer des réseaux de producteurs pour qu’ils améliorent leurs pratiques et utilisent moins de pesticides.
La question du changement climatique est aussi un autre volet pris en compte dans le projet « Smart Agriculture ». Selon Blandine Rosies, le changement climatique est en plein mouvement actuellement « nous observons des pluies assez exceptionnelles, des chaleurs plus fortes, la présence de plus en plus de ravageurs, des pesticides qui ne marchent plus forcément, parce qu’il y a des résistances… Il faut donc mettre au point des pratiques qui soient plus résilientes face à ce changement climatique,» explique t-elle.
Présenter une carte pour l’achat de pesticides
De par son rôle de lobby, la Chambre d’Agriculture entend pousser les instances en place à mettre en œuvre des mesures de contrôle et de formation auprès des vendeurs et des utilisateurs de pesticides. Ceci sera possible avec la déclaration obligatoire de tous les agriculteurs, après formation, à présenter une carte de planteur pour pouvoir acheter des pesticides.
Le CIRAD (Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement) partenaire de la Chambre d’Agriculture est impliqué depuis la première phase du projet et reste également un partenaire technique sur la reconception de systèmes de production et les techniques agricoles innovatrices particulières, mais aussi sur la connaissance de certains éléments qui concernent la gestion des bio-agresseurs. Par ailleurs, le Food Agricultural Research and Extension Institute est également un collaborateur du projet.
Un projet soutenu par des organismes internationaux
Le projet « Smart Agriculture » bénéficie du soutien de l’Agence Française pour le Développement, mais recherche aussi d’autres types de financement, en répondant à des appels à projets lancés, soit par le Mauritius Research Council, soit par le projet Biodiversité de la Commission de l’Océan Indien (COI). Ce projet Biodiversité financé par l’Union Européenne, vise à promouvoir la gestion, la préservation et l’utilisation durable des ressources pour le bénéfice de la population dans la région de l’Afrique orientale et de l’océan Indien.
Blandine Rosies, parcours d’une passionnée d’environnement
Après son bac scientifique, Blandine Rosies s’est orienté vers un BTS Agricole fait à La Réunion. Elle a ensuite effectué des études d’agronomie en Afrique du Sud (licence pro dans le développement durable); s’est ensuivi un Master à Paris en agro-écologie et c’est d’ailleurs grâce à ce dernier cursus qu’elle a obtenu un contrat en VSI (volontariat solidarité internationale) qui lui a permis de venir en mission à Maurice.
Maud Scorbiac, une ingénieure dynamique
A la fin de son cursus à l’Ecole d’ingénieurs agronomes de Toulouse, Maud a effectué son stage de fin d’année à Maurice au Domaine Labourdonnais et a obtenu ensuite un contrat VSI avec la Chambre d’Agriculture. Animée par le désir de changer les mentalités sur l’agriculture traditionnelle, elle est persuadée que Maurice ira de mieux en mieux dans la voie de l’agriculture raisonnée.